GÉRARD RAYMOND, président de France Assos Santé
CLAUDE EVIN, ancien ministre, ancien député, auteur et rapporteur de la loi, avocat au barreau de Paris
La loi Kouchner a apporté des droits individuels, mais aussi des droits collectifs. Les associations sont rentrées dans les établissements de soins par la Commission des usagers (CDU). La participation des usagers de la santé, regroupés dans des associations agréées du système de santé, est quelque chose d important. Nous constatons aujourd hui la nécessité d un changement de posture : il faut passer d une obligation à une réelle volonté d entrer en dialogue avec le patient. Cela nécessite une nouvelle organisation, il faut avoir autour de soi des équipes. Il faut avoir le temps de connaître la vie de la personne, ses représentations, ses peurs. Il faut créer des lieux d échanges, d accompagnement pour que des équipes puissent suivre les patients. Il faut une nouvelle organisation qui permette l instauration d un dialogue entre des sachants scientifiques et des sachants profanes. Si on avait une éducation à la santé dès le premier âge, si on éduquait les personnes à prendre soin d elles-mêmes, peut-être qu elles auraient un dialogue différent et plus constructif avec les professionnels de santé. La loi Kouchner offre des possibilités immenses. Elle ouvre des droits exigeant la connaissance, il faut maintenant passer à une démocratie en santé et à une collaboration dans l élaboration d une politique de santé.
Je suis très sensible à l expression des professionnels sur la complexité de la relation de soin. Mais la nécessité d informer le patient, de faire qu il soit acteur de sa santé, n est pas une contrainte. C est une démarche nécessaire d adhésion du patient à la démarche thérapeutique. La question du temps pose des difficultés. Cependant, il faut veiller à l application de ces droits. Il faut en connaître les raisons et les motivations. Les professionnels de santé ont besoin de bien identifier ce qu est ce droit à l information. Quand un médecin généraliste donne à un patient une lettre cachetée pour un autre médecin, il ne respecte pas l autonomie de la personne. Le patient a le droit de savoir ce que son médecin porte comme appréciation sur son état de santé. L un des motifs d insatisfaction de la loi du 4 mars, c est la question du traitement des différends entre patients et professionnels. La relation médecin-patient est particulière, il y a une démarche de confiance qui n existe pas d autres types de relation. Quand cette relation de confiance est cassée, nous n avons pas de procédure adaptée. Le temps est venu d introduire de vrais mécanismes de médiation entre les professionnels et les patients pour que le dialogue qui s est rompu puisse être renoué. Les relations entre les patients et les médecins ont évolué depuis 20 ans. Mais les principes fondamentaux qui ont prévalu à cette loi du 4 mars 2002 doivent rester présents dans cette relation.
TÉMOIGNAGE
TÉMOIGNAGE
« Nous constatons aujourd hui la nécessité d un changement de posture »
« Le temps est venu d introduire de vrais mécanismes de médiation entre les professionnels et les patients »
MÉDECINS n° 79 Mai-juin 2022