24 | MÉDECINS n° 75 Septembre-Octobre 2021
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Q U E S T I O N S - R É P O N S E S
Grève de la faim des personnes placées en lieu de privation de liberté : préconisations déontologiques
Lorsqu un détenu décide de manière volontaire de ne plus s alimenter, il met sa vie en danger. Le médecin qui l accompagne est alors confronté à un dilemme éthique.
Quelle position adopter ? Comment réagir ? Que faire face à la pression de l autorité administrative ? Le Cnom se positionne.
La grève de la faim est une démarche volontaire d un individu détenu qui refuse de s alimenter. Il le fait pour des raisons personnelles ou diverses liées à la procédure judiciaire ou administrative. Ce refus de s alimenter est problématique puisqu il expose la vie de la personne placée en lieu de privation de liberté dans un délai de l ordre de deux mois. Il met notamment en jeu et de manière irréversible des fonctions essentielles comme la fonction rénale. Quand la grève de la faim est associée à une grève de la soif, ce qui est rare, l issue est plus rapidement fatale.
Le médecin est confronté à un dilemme éthique. Il doit à la fois respecter
la décision de la personne gréviste, qui relève du principe d autonomie de décision, et prendre en compte la nécessité d assurer les soins. Le corps médical doit également faire face à la pression de l autorité administrative qui cherche à éviter un événement irrémédiable. Celle-ci peut alors se montrer très insistante pour que le médecin hospitalise le détenu, lui délivre des soins sans consentement ou l oblige à le nourrir. La position de l Ordre est donc d aider les médecins qui se trouvent dans ce contexte très particulier à faire valoir des arguments éthiques.
QUAND PARLE-T-ON DE GRÈVE DE LA FAIM EN LIEU DE PRIVATION DE LIBERTÉ ?
À QUELLES PROBLÉMATIQUES EST CONFRONTÉ LE MÉDECIN ?
DR GILLES MUNIER, vice-président du Conseil national de l Ordre des médecins
On estime le nombre de grèves de la faim « soutenues » entre 700 et 1 000 par an, sachant qu une grève de la faim est comptabilisée à partir du 7e jour sans s alimenter et à partir
de 48 h lorsqu elle est accompagnée d une grève de la soif. En 2006, le rapport du Comité consultatif national d éthique (CCNE) sur la santé en prison dénombrait 1 500 grèves de la faim en prison par an. Parmi ces cas, on considère qu une dizaine pose un problème vital de santé.
COMBIEN DE PATIENTS PLACÉS EN LIEU DE PRIVATION DE LIBERTÉ SE DÉCLARENT EN GRÈVE DE LA FAIM CHAQUE ANNÉE ?