RÉFLEXIONS
16 | MÉDECINS n° 74 Juillet-Août 2021
QUELS SONT LES AVANTAGES MAIS AUSSI LES LIMITES DE LA CONSULTATION À DISTANCE ?
otre baromètre télémé- decine a été très instruc- tif sur les avantages per- çus de la téléconsulta-
tion : elle fait gagner du temps au médecin (77 %), elle est un moyen de reconnecter les territoires en déficit de médecins (75 %), et elle fait gagner du temps au patient (73 %). Mais des craintes persistent avec force : la déshumanisation de la relation entre le médecin et son patient (78 %), le risque plus impor- tant d erreur médicale (71 %), ou encore le risque de piratage des données de santé (71 %). Sur ce dernier point, j espère pouvoir convaincre que nous avons les moyens de limiter ce risque. L ensemble des règles garantissant la sécurité sont reprises dans le référentiel télémédecine que notre agence a publié il y a déjà plus d un an. Ce référentiel définit les exi- gences attendues par un logiciel de télémédecine pour les actes de téléconsultation ou de télé-exper- tise. Si des documents de santé transitent par la plateforme de télé- consultation, alors son hébergeur doit être certifié « Hébergeur de données de santé ». Il y a aussi des enjeux importants d identitovigi- lance : il est normal que le médecin ait des garanties sur l identité du patient avec qui il fait sa télécon- sultation. En miroir, il y a l identifi- cation du professionnel de santé, et il est tout aussi légitime pour le patient d avoir également des garanties sur l identité du praticien avec qui il effectue cette télécon- sultation. Le risque zéro n existe pas plus en informatique qu en méde- cine. Et tout comme en médecine, le respect des bonnes pratiques concourt à réduire ce risque au maximum. Le recours à des solu- tions de téléconsultations respec- tant notre référentiel télémédecine est donc d usage.
tablir un diagnostic simple, renouveler une ordonnance ou contrôler l évolution d une maladie chronique : la majorité
des problèmes de santé peuvent trouver une réponse en télécon- sultation. C est aussi une parade intéressante aux déserts médi- caux et aux difficultés de dépla- cement des usagers de la santé. Par ailleurs, des médecins nous ont expliqué que le patient, installé chez lui, semble plus à l aise et parle davantage de sa maladie. C est positif. Des limites se dessinent malgré tout. Nous attirons l atten- tion sur le risque de développement de plateformes privées de télécon- sultations ou encore de voir fleurir des offres des assurances com- plémentaires qui ne répondent pas au caractère solidaire du système de santé. Un cadre clair est donc nécessaire pour éviter l « uberisa- tion » de la santé. Les associations de patients seront particulière- ment vigilantes au respect des données de santé, et sur les garan- ties, la qualité des soins et sur la certification des professionnels de santé. Le développement de ces nouveaux dispositifs résidera dans la confiance des patients. Et la confiance passe par la transpa- rence, la sécurité et la participa- tion.
ans le contexte de la pandémie de Covid-19, les risques de dérives n ont jamais été aussi
prégnants. Des plateformes « offreuses » de soins agissent déjà en dehors de toute organisation territoriale reconnue et de tout parcours de soins. Sans compter qu elles militent pour une dérégu- lation totale de la santé sous cou- vert d un meilleur accès aux soins. Le Cnom dénonce par exemple avec force les cabines de télécon- sultation installées dans les super- marchés, à grand renfort de publi- cité commerciale. Les médecins qui répondent à ces sirènes com- merciales doivent eux aussi se remettre en question. Il leur appar- tient donc de demander aux socié- tés commerciales par l intermé- diaire desquelles ils exercent de s inscrire dans le cadre d organi- sations territoriales référencées et de cesser toute campagne publi- citaire nationale à visée commer- ciale. La santé n est pas un com- merce.
N
É D
Annie Prévot
Gérard Raymond
Pr Stéphane Oustric